Texte: Charly Dupasquier (Charly . D)
Photos: Charly Dupasquier (Charly . D), et Richard Mardens
© Richard Mardens
Lors de l’expédition ARUNDO, où j’ai traversé l’arrière-pays Québécois sur les sentiers forestiers à travers de nombreux territoires, j’ai eu l’honneur de connecter avec divers animaux sauvages. Des rencontres qui ne laissent jamais de marbre et qui pour moi, ont toujours un sens. Mon expédition à vélo fut un tournant dans ma vie, une grande remise en question… Une étape pour aller mieux physiquement et mentalement. Cette expédition fut une quête de résilience face à la maladie auto-immune dont je suis atteinte, la spondylarthrite axiale et la dépression, dont j’ai dû faire face suite à des chocs post-traumatiques.
À l'image de forts symboles, ces rencontres vibrent en moi de la même façon que le grand chef héréditaire de la Première Nation Anicinape (Algonquin), Dominique Rankin. Dans le podcast ‘’Le Chemin Rouge’’, ce grand chef parle de cette connexion et surtout des messages que nous livre la rencontre avec ces animaux. C’est une connexion intime partagée entre eux et nous, un gage de respect. Je suis profondément attirée et fascinée par la culture Anicinape et j’aimerai vous révéler ce que ces animaux rencontrés, m'ont donné comme enseignements lors de mon périple. Mettre en parallèle ce qu’ils symbolisent pour ce peuple racine et dans le chemin de vie où je me situe présentement. Toutes ces rencontres et leurs symbolismes culturels ont été significatifs. En voici quelques-uns pour cette première partie de mes ''Histoires sauvages'' :
Le chevreuil : Au petit matin, je me réveille. Je sors de ma tente au milieu de ce parc semi urbain, entouré de forêt. Quelques chevreuils accueillent notre réveil, aux petites lueurs du jours, broutant paisiblement. Cet animal porte l’intelligence féminine, la confiance en soi et nous invite à sauter les obstacles qui entravent notre vie. Rencontrer ce bel et fier animal, intuitif et sensible, nous incite à ne pas rester dans le flot de nos émotions négatives, afin de passer par-dessus avec calme et détachement. Grâce à lui, je suis prête à affronter la prochaine montagne.
© Richard Mardens
La Marmotte : Nous pédalons à travers la campagne. À l’orée d’un champ, un petit museau sort d’un trou. Une marmotte apparait et nous regarde. Nous nous arrêtons. Nous l’observons, alors qu’elle nous offre un show délicieux pendant plusieurs minutes. Je vais bien cette journée-là. Je sens que le travail que je fournis porte ses fruits. Ce n’est donc pas un hasard si marmotte la débrouillarde, est venue à ma rencontre aujourd’hui. Elle qui symbolise le travail acharné qui peut changer une vie. Cette traversée du Québec à vélo bikepacking, malgré les douleurs de la maladie, en est un. Véritable architecte de son terrier, elle symbolise aussi le fait de se bâtir un intérieur serein et remplie d’amour. Serviable et loyale, elle me reflète une partie de moi-même : celui de prendre soin de mon partenaire, des personnes qui me sont chères mais aussi de prendre soin des autres. Cette expédition est aussi porteuse d’une mission plus grande : celle de collecter des fonds pour aider les personnes atteintes de la même maladie auto-immune que moi, et sensibiliser. Je comprends encore plus son apparition ici.
© Charly Dupasquier
La salamandre : Même en pédalant, j’ai les yeux sur l’infiniment grand comme l’infiniment petit. Un matin, je manque de rouler sur une salamandre pourpre, encore transit par le froid de la nuit. Elle reste là immobile, attendant que la température réchauffe son corps. Elle symbolise une grande période de transition. Ce que je suis en train de vivre littéralement. Elle m’invite à changer avec le temps, fortes de mes diverses expériences de vie. De comprendre la réalité que c'est d’être parfois au sommet et parfois tomber très bas. Ce que j’ai vécu dernièrement. La salamandre nous rappelle d’utiliser notre temps à bon escient. Le temps est la véritable richesse. Enfin, elle est porteuse d’un message puissant, celui de la désintoxication. Des choses dans ma vie me causent de la douleur, du stress et de l’anxiété, me laissant vulnérable et remplie de doutes. La rencontrer est un signe que des changements doivent s’opérer pour me délester de ce poids et m’éloigner de ce qui est toxique pour moi. J’ai croisé cet animal à plusieurs reprises la même journée.
© Charly Dupasquier
Le loup : En sortant de la réserve Papineau-Lebel, proche de Mont Tremblant, je suis stupéfaite d’observer de nombreuses grosses pattes de canidés… Impossible que ce soit du chien. Il n’y a aucune trace d’humain, ni de souliers. Bien trop gros pour du coyote. Quelques coups de pédales plus loin, je vois la preuve de ce qui m’effleurait l’esprit depuis plusieurs minutes : des crottes de loups ! Il ne s’est pas montré à moi dans sa sublime parure, mais il m’a laissé ses traces. Vivant en meute, il est symbole d’entraide. Ce qui est très éloquent dans cette expédition basée sur ces valeurs et où chaque membre veille sur les autres. Évoquant à la fois le mystère et la connaissance de soi, il me prouve que ce que j’ai entrepris me mène sur le chemin de la connaissance de moi-même. Dans la culture Algonquine, il joue un rôle puissant pour les humains qui ont besoin de guérir. Encore un clin d’œil à ma situation de santé physique et mentale. Il nous invite à libérer les peurs et les émotions enfouies, soignant les blessures très anciennes. Et j'en ai une belle couche à soigner ! C’est aussi pour cela que je suis partie sur les chemins à vélo. Trouver cette paix me permettant de transformer des blessures en cicatrices qui ne se rouvriront plus. Plonger en moi, pour guérir ce qui doit.
© Charly Dupasquier
Le porc-épic : C’est un animal médecine fort particulier. Je roule sur la piste cyclable, lorsque nous croisons ce porc-épic en plein repas. Il nous observe. Et en comprenant que nous n'étions pas une menace pour lui, il continue de se remplir la pense, me laissant l’observer avec délicatesse. Je m'amuse à le regarder attraper les feuilles avec son museau. Il incarne à la fois la vulnérabilité et la protection. Cela tombe bien, je me sens particulièrement vulnérable lors de cette expédition. Cet animal calme et tendre malgré ses pics acérés est d’ordinaire discret, se cachant dans les arbres. L’observer à terre en zone semi urbaine achalandée, est une chance. Il s’ancre à la terre, solidement connecté à ses racines. Il nous montre la voie de la sérénité et du calme, pour évoluer en douceur dans la vie tout en sachant se protéger lorsqu’il est nécessaire. Il est l’équilibre entre l'ouverture et la protection. Je ne le rencontre pas par hasard. Une des choses que je suis venue chercher sur ce chemin, c’est cet équilibre. Cette sérénité dans mon état d'esprit, de savoir quand m'ouvrir et quand montrer mes pics pour me protéger.
© Charly Dupasquier
La couleuvre : Au détour d’un sentier de terre, cette couleuvre rayée reste immobile malgré nos roues qui vibrent au sol. Son corps est aplati sur la route chaude afin d’emmagasiner un maximum de chaleur printanière. Nous posons délicatement nos vélos pour entrer en connexion avec elle. Les reptiles me fascinent depuis que je suis jeune. J’ai d’ailleurs commencé en biologie de la conservation en tant qu'herpétologue. Les peuples autochtones lui font une très grande place, car elle vit en contact avec la terre, la terre maman. Elle incarne l’énergie vitale, la force qui donne vie à tout. Étant donné que la maladie me prend beaucoup de cette précieuse énergie, je la vois comme un signe. Elle m’annonce une période de fécondité et de créativité indéniable. Et à ce stade de l’expédition, je savais ce que cela signifiait. Je suis en train de refaçonner ma vie, de la recréer, en route vers l'épanouissement. Sa puissance va m’accompagner. Elle m'indique aussi une renaissance… Elle qui se renouvelle en délaissant son ancienne peau régulièrement, je dois délaisser tranquillement la mienne pour faire peau neuve, ici, sur ces sentiers et lors de mon retour. Sa rencontre tombe à pic ! Je dois essayer de me libérer de mes anciennes chaînes. Lorsque la couleuvre se présente à nous, c’est le temps de plonger en soi sans peur, pour se guérir des blessures profondes. Et cela ne peut se produire qu’en ayant le courage de faire face à soi-même sans artifice et laisser le passé derrière soi.
© Richard Mardens © Charly Dupasquier
La semaine prochaine, je poursuis mon récit sur ces rencontres fauniques puissantes et pleine de sens qui ont amené à de belles introspections lors de cette incroyable périple que fut l’expédition ARUNDO.
En attendant, libre à vous de vous abreuver de cette culture des premiers peuples, et de commencer à voir dans vos rencontres fauniques, des messages puissants en référence à votre propre chemin de vie. Ouvrez vous à ces rencontres et à cette connexion avec les êtres vivants qui vous entourent. Nous avons beaucoup à apprendre des animaux !
À jeudi prochain !
Pour en savoir plus sur l'expédition, visitez : https://arundo.ca
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