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Histoires sauvages : Ces rencontres fauniques qui nous enseignent - Partie 2

Photo du rédacteur: Charly . DCharly . D

Texte: Charly Dupasquier (Charly . D)

Photos: Charly Dupasquier (Charly . D), et Richard Mardens 


© Richard Mardens


Voici la seconde partie de cette symbolique animalière que je veux vous partager suite à l’expédition ARUNDO.


Toujours aussi significatifs, la rencontre avec ces êtres vivants est puissante, vous comprendrez rapidement pourquoi.

 

  • Le castor : Dans ce territoire sauvage aux portes de la Gaspésie, les rivières abondent et le castor y règne en maître. Architecte de nos cours d’eau, il est fascinant de le voir à l’œuvre, comme nous l'offre ici, une petite famille sur les bords de la rivière Matane. Nous les guettons dans leur entreprise colossale, ayant commencé à ronger un arbre conséquent. Le castor nous a vu, il tape de la queue. Il nous avertit de ne pas approcher, nous sommes chez lui. Autant dans l’eau que sur terre, c’est un travailleur vigoureux. Solide et fiable, il construit un abri de luxe pour protéger sa famille. Il façonne son environnement, le transforme mais sait aussi quand le quitter pour le laisser se regénérer. Son corps offre de très nombreuse médecine. Il nourrit et soigne les premiers peuples depuis la nuit des temps. Il m’enseigne le courage, l’ingéniosité. Nous ne le savions pas encore mais la journée suivante, nous en demandera beaucoup ! Il est gage de ténacité, pour ne jamais baisser les bras. Il aime la vie et me dit de faire de même. Lors de cette rencontre, j’étais entré dans un état d’esprit qui me caractérise beaucoup plus. Comme si mes démons s’étaient fait plus discrets. Je croquais à pleine dents dans cette aventure qui était la nôtre.


© Charly Dupasquier




  • La bernache et l'oie blanche : Ces nomades ont enchanté notre expédition printanière. Nous étions aux premières loges de leur arrivée sur nos terres. Voir ces grandes envolées d’oies et de bernaches sur les champs est un spectacle élégant et d'une beauté plein de synchronicité. C’est un ballet de danse voluptueux qui transporte votre âme. Leur présence me rappelle notre parcours. Les kilomètres que nous avalons sur nos vélos, à la sueur de nos jambes et de notre détermination pour atteindre notre objectif. Comme elles. Entendre leur chant nous fait prendre conscience du passage du temps et des saisons. C’est le signal qu’il faut se préparer à un changement d’environnement. Observez leur vol ! La façon dont chacune est à sa place, suivant des leaders qui s’alternent en écoutant et respectant leurs limites. Chacun prend la place de l’autre à tour de rôle, les moins expérimentés apprenant de leurs comparses. Ils nous apprennent à être des mentors, et non des chefs de pouvoir. Et aussi, de ne jamais croire que nous sommes indispensables, à déléguer lorsque c’est trop, et de demander de l’aide au lieu de prendre tout sur les épaules. Elles nous montrent le vrai sens du leadership, la cohésion d’un groupe et à respecter nos limites. Cela symbolise la force de notre équipe sur cette expédition. Nous ressemblons à un vol d’oies sauvages.


© Richard Mardens


  • L'ours : Nous n’avons pas de photos des trois ours qui ont croisé notre chemin dans la réserve de Matane. Celle-ci vient d’une autre observation que j’avais faites des années auparavant. C’est une émotion très particulière de connecter avec cet animal qui fascine et intimide à la fois. L’excitation et l’émerveillement se mêle rapidement aux doutes et à la nervosité. Le premier individu a été surpris par nos vélos à pleine vitesse et a sauté dans les fourrés. Les deux autres, plus téméraires, nous ont jaugé quelques instants, faisant quelques pas en notre direction. Assez pour que nous prenions une protection dans nos mains au cas où (la petite fusée à pétard et le spray à ours) , reculant calmement. Finalement, ils sont repartis nonchalants dans le bois, nous laissant assez nerveux pour le reste de la journée, mais au combien émerveillés. L’ours noir est puissant et courageux. Il m’inspire beaucoup, même s’il m’impressionne et parfois même, me fait peur. Une maman est très protectrice avec ses petits, comme nous avec nos proches. Elle sait où sont les meilleurs endroits pour leur survie tout en s’entourant des ressources nécessaires. Ces animaux savent marcher, courir, nager et grimper. S’amuser aussi, beaucoup. Ils se sont offerts à nous pour nous montrer le chemin de la force, du courage et nous apporter l’esprit de protection dont nous avions besoin pour affronter ce qui s’en venait : les montagnes gaspésiennes et leurs défis. L’ours est connu pour être un puissant esprit de transformation et de guérison. Je porte alors en moi ces trois rencontres qui me suivront longtemps.


© Charly Dupasquier


  • Le lièvre : Après une journée remplie d’aventures, à monter avec nos vélos au sommet de la Gaspésie cumulant 1 330 m de dénivelé en une journée, traverser une rivière à gué avec nos montures à travers le courant, être pris par la neige sur les hauteurs et changer d’itinéraire, nous nous écroulons à un bivouac improvisé au bord du lac Joffre. Épuisés, avalant notre repas, Monsieur le lièvre s’approche avec désinvolture. Il vient sentir, curieux de nous voir ici. Ce petit compétiteur, suivant la légende Anicinape et les fables de Lafontaine, a dû apprendre à lâcher-prise à bien des reprises. Tient, tient, c’est aussi ce que je dois faire. Il est venu m’enseigner ce qu’il a apprit avec sa propre histoire. Soit prendre la vie avec plus de légèreté et d’insouciance. Et surtout, d’éviter de se comparer. Après tout, à chacun son Everest ! À chacun ses forces et ses talents, c’est là la beauté de la vie. Il vient me dire de ne pas être trop sévère avec moi-même et d’apprécier ce que je suis avec humilité. Bref, il se rappelle pourquoi il a perdu contre la tortue !


© Charly Dupasquier


  • L'orignal : Cette animal nous a gâté de sa présence dans la réserve de Matane. Plus de douze orignaux en trois jours. Mais ce que nous avons vécu avec cette femelle orignal à la sortie de la ZEC Cap-Chat, fût très fort et chargé en émotion. Pour la petite histoire, la voyant en peine immobile sur le sentier, nous nous doutons qu’elle est en mauvaise posture. Elle marche avec douleur. Je pense donc qu’elle est blessée. Son regard plongeant dans le mien, je suis remplie d’empathie et de douceur. Son regard doux et à la fois désemparé m’a ébranlé. Lorsqu’elle s’est retournée, c’est là que nous avons aperçu son petit mort-né, encore coincé à l’entrée de son vagin. La mise bas ne s’est pas déroulé comme prévu, et les contractions ne venant plus, son petit était pris au piège… Elle aussi. Vivre ce moment intime avec elle est émotionnellement fort. Nous ne pouvons rien faire, à part accepter ce que la nature réalise. C’était son chemin à elle. L’orignal est le roi et reine des forêts, fier et assuré. La prestance émanant de ses bois est tel, que l’observer impose le respect. Son calme et sa grandeur impressionne, il sait marquer ses limites. Il symbolise l’acception des situations telles qu’elles sont. Cette femelle orignal en témoigne. Son calme est olympien. Lorsque l’orignal s’enfonce dans la forêt, avec son pas assuré, rien ne lui résiste. Il vient nous dire ‘'Avance sans hésiter et suis ton chemin avec détermination et confiance''. Après avoir grimper les montagnes gaspésiennes, je venais de réaliser ce que j’avais parcouru et j’en étais fière. Je savais quel chemin emprunter. Cette femelle orignal est venu me le confirmer. Elle m’a donné l’énergie d’avancer sur mon chemin coûte que coûte et d'être résiliente.


© Charly Dupasquier


© Richard Mardens


  • Le canard : Les canards sont de grands voyageurs. Avec son radar intérieur, il sait toujours retrouver son chemin. Doux, calme, amical et élégant, il sait aussi se quereller avec les autres animaux. Mais les querelles coulent sur son plumage, fluide comme l’eau. Il incarne l’instinct du voyage, celui là même que nous vivons. Nous sommes comme lui, des nomades à vélo, qui vivent sur le chemin, leur maison comme monture. Je me laisse alors guidé par lui, avec détachement. Nous observons ce canard arlequin quelques minutes en parade nuptiale, sur la majestueuse rivière aux Émeraudes.


© Richard Mardens


  • La tortue : C’est devenu mon totem lors de cette expédition, et qui guidera une grande partie de mon chemin de vie dans l'écriture des nouveaux chapitres. Cet animal nous invite à continuer notre chemin avec détermination et sérénité. Bien qu’elle se déplace lentement sur terre, elle est aussi extrêmement rapide et agile dans l’eau. Elle inspire à prendre le temps. À regarder autour de nous, afin de trouver des solutions équilibrées et durables à nos préoccupations. Traditionnellement, chez beaucoup de peuples racines, elle représente la paix. Elle nous invite à créer la paix en nous-même et développer des relations de paix avec les autres et notre environnement. Ce dont j’ai grandement besoin après les traumas vécus. Elle symbolise aussi la connexion avec la terre maman, l’enracinement, la sagesse et la patience. D’ailleurs, certaines légendes racontent que la tortue a porté le poids de la terre et tout le continent américain sur son dos. Cette image est également présente dans les cultures hindoues et chinoises. Elle est l’équilibre du monde. (Les photos de bébé tortues des bois ci-dessous provienne d'une autre expédition sur la rivière Coulonge que j'ai fait l'automne dernier. Dans la ZEC Lavigne, nous n'avons pas eu la chance d'en photographier bien que nous étions dans son habitat).


© Charly Dupasquier


J'aspire à devenir tortue ! C'est d'ailleurs comme cela qu'on a surnommé mon vélo : le blue turtle. Le lendemain de l'avoir nommé ainsi, la confirmation que c'était le nom idéal nous est apparue : Arrivés à l'entrée de la ZEC Lavigne, nous tombons sur un panneau indiquant ''Habitat de la tortue''. Encore un signe !


 
 
 

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