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Plaidoyer pour toi, mon Béluga...

‘’Le passé laisse des traces, toujours ! Des traces qu'on suit encore, avec une brèche de nostalgie dans le coeur. Comme une grafignure qui ne cicatrise pas’’ disait Fred Pellerin…


La brèche que j’observe 6 mois par année n’est pas empreint de nostalgie. Elle vit au présent, en constante évolution, intemporelle et impermanente. C’est le majestueux fleuve Saint-Laurent, né d’une brèche hasardeuse anciennement envahie par la mer de Champlain, qui en se retirant il y a 10 600 ans, a laissé derrière elle un écosystème fascinant. C’est le fleuve, c’est la mer, c’est l’estuaire. C’est tout ça à la fois. C’est lui qui donne le tempo au rythme de mes journées de technicienne en biologie marine, de ma vie de kayakiste, de ma vie de capitaine, de ma vie d'aventurière folle de nature. Ce même Saint-Laurent qui abrite les plus grands mammifères que la terre ait porté… Ce même Saint-Laurent qui entre ses gouttelettes d’eau reliées par milliers, se faufile notre emblème : Le Béluga. Ce canarie des mers, ce marsouin blanc. Mon principal bébé d’une job qui me passionne depuis maintenant 8 ans. Il est tout ça à la fois.

Après avoir rampé sur des montagnes pour comprendre les lézards verts et les couleuvres, après avoir enlacé des arbres à plus de 300 mètres en falaise pour comprendre leur mécanisme de sénescence, après avoir traqué les mammifères aquatiques sur toute les rivières de France en vue de leur sauvegarde, après avoir caractérisé des centaines d’habitats en comptabilisant toutes leur flore témoignant de leur bon ou mauvais fonctionnement ou chaque espèce a un rôle spécifique maintenant les maillons d’une chaine que l’Homme peut briser en une fraction de seconde pour sa gourmandise consumériste… Me voilà face à toi, Béluga. Je t’attends au bout de mon quai de Rivière-du-Loup, sur la montagne de Cacouna, sur un zodiac parfois et souvent même dans mes rêves. J’attends que tu me crache de l’eau, que tu viennes diner avec moi, troquer une soupe contre un hareng bien frais ; que tu me présente tes bambins, celui qui vient de naître et son frère en pleine crise d’adolescence avec sa peau grise qui se parsème de blanc telle de l’acné océane. Que tu me parle, que tu siffles, que tu grogne en sortant la tête de l'eau.

Hubert Reeves a dit un jour ‘’À l’échelle cosmique, l’eau liquide est plus rare que l’or’’… J’ajouterai que ce qui y vit aussi. Aussi rare que l’eau cosmique, le béluga du Saint-Laurent témoigne de l’état de santé de ce dernier et si j’extrapole, de l’état de santé de tous nos écosystèmes qui, aujourd’hui, possèdent tous leur totem en voie de disparition, leur baromètre éminent…


Du haut de ses quelques 850 à 900 âmes, le béluga du Saint-Laurent est en péril, comme l’espoir qui habite de nombreux défenseurs de la planète, de l’humain, de la vraie nature des choses. Les choses bougent, notre travail est une pierre à l’édifice. Nous reconstruisons chaque jour, à chaque projet, la pyramide branlante de nos écosystèmes naturels dévastés et dénaturés, pour un ''reset'' d'un monde en équilibre ou tout fonctionne intrinsèquement. Mais le Saint-Laurent est emproie à une pollution physique, chimique et sonore que nous avons tous contribué à diffuser… C’est à nous tous de rectifier le tir. On ne tire plus sur le béluga depuis 1979. Arrêtons de nous tirer dans le pied en ruinant un écosystème essentiel à notre survie à nous aussi, dont la banqueroute entraînerait la perte indubitable de centaines d’espèces dont nous dépendons inexorablement. ‘’Ne doutez jamais qu’un petit nombre de personnes conscientes et engagées puissent changer le monde, c’est toujours ainsi que le monde a changé’’… C’est ce que nous a enseigné Margaret Mead. C’est ce que des personnalités fortes comme Gandhi ont fait pour défendre leurs valeurs et reconstruire un monde meilleur. Soyons ce petit nombre de gens conscients qui font avancer les choses pour un futur durable en respect avec notre environnement. Retrouvons le chemin de la nature, on en fait parti, on est un tout. Tenons la nageoire du béluga, en lui tendant notre main. Par des gestes quotidiens comme la réduction de nos emballages plastiques, de nos déchets bien trop envahissants, de nos produits chimiques, du tintamarre assourdissant que nous produisons dans nos océans, de notre consommation excessive qui n’assure en rien notre survie mais qui au contraire, la compromet chaque jour un peu plus …. Tel est le plus grand leurre de nos actuelles croyances sociétales. Elle compromet celle de mon pote au dos blanc qui perce la glace pour prendre sa poff d’air avant de replongée dans les abysses Laurentiennes.

Allez … T’es capable toi aussi ! Nous sommes tous capables… Peu importe notre statut social, notre budget, peu importe à quoi on ressemble ou ce qu’on porte sur le dos ou dans quelle maison on vit… On trottine sur les mêmes chemins pavés de roches et de racines au bout du compte. Et face aux catastrophes naturelles ou quand on sera rendu aux portes de l’enfer … Nous combattrons les mêmes flammes. Nous sommes tous égaux face à la mort. Face à l'adversité, l’entraide est notre seul allier. On peut donc tous se tenir la main, la patte, la nageoire, pour recréer la chaîne de la vie, où chaque maillon croit en un avenir plus naturel, plus vrai, plus beau, plus sain, plus harmonieux. Les maillons, c’est nous, c’est toi, c’est moi, c’est le béluga...



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